Interaction entre la réduction du CO2, la compensation des émissions de GES, l’élimination du CO2 (émissions négatives) et la politique
Photos: Karl-Udo Rehm
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Community Insights des échanges d’expérience CEO4Climate
Parallèlement aux échanges d’expérience confidentiels sur l’élimination du CO2, sur la compensation des émissions de GES, sur le greenwashing et sur les Science Based Targets, échanges qui sont la raison d’être de CEO4Climate, les personnalités ci-dessous ont fait part de leur expérience pratique et livré des pistes de réflexion pour la discussion:
Andreas Aepli
CFO Climeworks
Cyril Brunner
Climatologue ETH Zürich
Laura Meyer
CEO Hotelplan
Christian Plüss
CEO PostAuto
Stefan Rösch
Directeur Climate Solutions South Pole
Andreas Staubli
CEO PwC Schweiz
Key Community Insights
- Au sein de la communauté CEO4Climate, malgré les incertitudes économiques et géopolitiques, on accorde toujours une place importante au thème zéro net – alors que des enquêtes montrent que la protection du climat a perdu de son importance dans l’économie vu les priorités à court terme. Cela montre combien l’implication du dirigeant et des formats tels que CEO4Climate sont essentiels pour ne pas perdre de vue l’importance stratégique de ce sujet. Les évolutions réglementaires, notamment les Corporate Sustainability Reporting Directives (CSRD) y contribuent également.
- L’intégration des feuilles de route zéro net dans la stratégie des entreprises est fondamentale – la définition des mesures et la mesure des progrès du processus seront ainsi garanties – et fait l’objet de discussions régulières avec le management et le conseil d’administration.
- Avant d’acheter des certificats de protection du climat, les entreprises doivent réduire autant que possible les émissions dans leurs chaînes de valeur. La sélection des projets de protection du climat et la communication externe en la matière requièrent beaucoup de doigté. Une assistance et une expertise externes sont alors utiles.
- De nombreux participants qui se considèrent comme des pionniers veulent également aller de l’avant dans le domaine de l’élimination du CO2 et contribuer à développer ce marché important. Les raisons sont diverses: différenciation sur le marché, fidélisation des collaborateurs, mais également crédibilité de l’objectif zéro net de l’entreprise sont citées.
- Il existe une forte pression de la part des médias, des clients ou des collaborateurs concernant les reproches de greenwashing, ce qui peut conduire parfois à trop de retenue en matière de communication interne et externe (greenhushing). Cela ne va pas dans le sens de l’économie climat compatible. Les mesures devraient cependant être claires et vérifiables et présenter une certaine cohérence et proximité par rapport au métier de base.
- Les objectifs SBT de l’initiative Science Based Targets sont perçus comme étant ambitieux mais pertinents. La gestion des émissions du scope 3 – en particulier la répercussion de l’objectif sur les fournisseurs et la collecte de données – constitue un défi majeur. La principale contribution du CEO consiste à ancrer clairement les objectifs climatiques dans la stratégie.
Élimination du CO2: comment les entreprises peuvent-elles encourager le développement de ce marché?
L’élimination du CO2 sera déterminante pour atteindre l’objectif zéro net d’ici 2050, tant au niveau national que mondial. Ceci tout en sachant que la réduction des émissions doit rester la priorité y compris au cours des prochaines décennies et que l’élimination du CO2 ne peut en aucun cas justifier de limiter nos ambitions en matière de réduction de nos propres émissions.
Community Insights
- Il existe un consensus quant au fait que l’accent doit être mis sur la réduction des émissions. Cela engendre déjà de nombreux défis; les capitaux nécessaires pour investir sont limités. Dans un contexte de concurrence entre les investissements, les mesures de réduction des émissions et le développement des énergies renouvelables seront à terme toujours gagnants.
- En même temps, de nombreux participants se considèrent comme des pionniers et veulent également aller de l’avant dans le domaine de l’élimination du CO2 pour contribuer à développer ce marché important. Les raisons sont diverses: différenciation sur le marché, fidélisation des collaborateurs, mais également crédibilité de l’objectif zéro net de l’entreprise sont citées
- Beaucoup se laissent convaincre par l’argument suivant: les installations qui sont financées aujourd’hui par les clients pourraient à l’avenir être toutes vendues et, s’il existe une demande supplémentaire qui n’a pas fait l’objet d’accords à long terme, on pourrait s’attendre à des prix élevés en raison de pénuries. S’engager aujourd’hui peut donc se justifier pour s’assurer qu’à long terme l’entreprise pourra disposer de certificats.
- Les PME en particulier ont besoin de portefeuilles (une combinaison d’approches différentes en termes de prix, de durabilité etc.) qui permettent un accès facile. Ce sera la tâche des conseillers ou des associations de composer de tels portefeuilles.
- Pour poursuivre le développement du marché de l’élimination du CO2, le développement des connaissances, la transparence et des contrôles de qualité, un cadre réglementaire adapté (prix du CO2, valeurs limites, interdictions) et une augmentation de la demande de produits zéro net sont nécessaires.
- Il semble que toute entreprise poursuivant de manière crédible un objectif zéro net devra s’engager dans la voie de l’élimination du CO2 pour les émissions non évitables (souvent 10-20 % de l’empreinte).
- En tant qu’entreprise, pour contribuer dès maintenant au développement du marché, il est pertinent de définir un budget par tonne d’émissions non évitables à long terme. Exemple: une entreprise a 1000 tonnes d’émissions non évitables à long terme et le prix acceptable pour le management est de 100,– par tonne; 100.000,– peuvent donc être budgétés pour différents projets biologiques et techniques. Agir ainsi conduira à long terme à des prix plus bas.
Informations complémentaires
«Compensation des émissions de gaz à effet de serre (GES)»: à quoi faut-il faire attention pour avoir un impact et être crédible?
Le débat public et les critiques émises concernant l’achat de certificats climatiques se sont intensifiés ces derniers mois. La discussion porte sur la place actuelle et future que doivent avoir les certificats climatiques en général dans la réalisation des objectifs climatiques à moyen terme.
Community Insights
- Dans la discussion sur l’achat de certificats climatiques, un certain nombre de questions se posent – en particulier s’il doit y avoir une égalité entre les émissions et les certificats, comment la qualité des certificats peut être garantie et quelle doit être la communication en externe au sujet des efforts faits dans ce domaine.
- Il est clair qu’il faut privilégier les mesures internes à l’entreprise par rapport aux compensations externes. Elles sont également plus faciles à contrôler et conduisent directement à des réductions des émissions. Ces investissements sont aussi souvent plus profitables financièrement.
- Pour les entreprises qui souhaitent compenser les émissions non évitables par l’achat de certificats climatiques, il est actuellement difficile de s’y retrouver sur le marché. Il y a de grandes différences de qualité entre les projets. Une plus grande transparence sur le marché des certificats climatiques est souhaitable. Des plateformes de notation, comme par exemple Calyx Global, sont en cours de développement et permettront de mieux évaluer la qualité des certificats. Une réglementation établissant clairement des critères de qualité permettrait de renforcer la crédibilité et offrirait plus de sécurité aux acheteurs. Pour le moment, on recommande d’étudier soigneusement les partenaires locaux et si nécessaire de faire appel à une expertise externe.
- La communication au sujet de l’achat de certificats climatiques requiert beaucoup de doigté – la simplicité peut aider. On recommande d’éviter le terme «compensation». Cela aide en termes d’acceptation et de sincérité. Les projets de protection du climat peuvent aussi être mis en œuvre sans qu’il y ait une communication active sur ce sujet. En matière de communication, il vaut mieux se focaliser sur les mesures internes à l’entreprise.
- Les critiques de ces derniers mois ont conduit à un assainissement de la branche, tant au niveau de la qualité des projets que des prestataires. Un assainissement semblable est attendu sur le marché de l’élimination du carbone dans les prochaines années.
Informations complémentaires:
Plateformes de notation pour l’amélioration de la transparence, par exemple
Greenwashing & Greenhushing: communiquer et être source d’inspiration sans enjoliver?
Les entreprises font l’objet de plus en plus de critiques sur leur communication en matière de développement durable. Cela va si loin que les entreprises s’abstiennent de communiquer par peur d’être accusées de greenwashing. Quelle est la bonne façon de communiquer pour les entreprises et quel est le rôle du dirigeant dans ce domaine?
Community Insights
- Il existe une forte pression de la part des médias, des clients ou des collaborateurs concernant les reproches de greenwashing, ce qui peut conduire parfois à de la résignation en matière de communication interne et externe. En même temps, la communication est essentielle afin que les clients, les fournisseurs et les collaboratrices et collaborateurs soient toujours sensibilisés et que les entreprises allant de l’avant soient aussi source d’inspiration pour les autres.
- Les ambitions et les mesures relatives aux objectifs zéro net doivent être claires et vérifiables. Il importe que la communication tienne compte des groupes cibles pour faire comprendre les besoins et les solutions. Certains objectent qu’il est difficile de communiquer sur les certificats de protection du climat qui ne sont pas utilisés pour la compensation mais pour des contributions à la protection du climat («impact claims»).
- Les mesures doivent être concrètes. En particulier, une certaine cohérence et proximité par rapport au métier de base (notamment aussi géographique) peuvent rendre les mesures plus crédibles. Une communication trop technique peut entraîner de l’incompréhension (et de la frustration); raconter une histoire simple, émotionnelle ou personnalisée est souvent plus efficace.
- Il importe de ne pas communiquer sur tout – le mieux est souvent l’ennemi du bien.
- Les collaboratrices et collaborateurs sont en même temps des parties prenantes importantes et des messagers pour une communication crédible en matière de développement durable. Leur position et leurs avis sur les projets de développement durable sont déterminants en termes de résultats; ils devraient donc y être associés et sensibilisés très amont pour défendre activement l’engagement de l’entreprise en interne et en externe. Cela a également des conséquences positives sur l’attractivité et la réputation de l’employeur – critères de réussite déterminants en période de manque de personnel qualifié («war for talents»).
Informations complémentaires
Science Based Targets initiative
Les objectifs de la Science Based Target Initiative (SBTi) sont exigeants mais sont en même temps considérés comme étant particulièrement crédibles. La discussion a porté sur les retours d’expérience avec cette norme, notamment en ce qui concerne la réalisation des objectifs et les enjeux liés à l’intégration des fournisseurs.
Community Insights
- Une grande partie des entreprises CEO4Climate indiquent au moins leurs émissions directes (scope 1 et scope 2). Les entreprises CEO4Climate ayant des objectifs SBTi sont de plus en plus nombreuses. La réalisation des objectifs SBTi représente cependant un défi en particulier pour les entreprises qui croissent rapidement.
- Pour la plupart des entreprises, c’est dans le scope 3 que le levier est le plus important. Les réductions d’émissions dans les scopes 1 et 2 sont déjà considérées comme étant presque triviales ; sans une gestion crédible et donc faisable des émissions du scope 3, il existe un risque de greenwashing. La collecte de données auprès des fournisseurs reste cependant très complexe.
- Il existe un certain risque que les objectifs fixés conformément à la SBTi ne soient pas (ne puissent pas être) respectés et donc qu’il y ait une (nouvelle) sortie d’entreprises dans les prochaines années. Cela constitue un frein pour les nouvelles entreprises qui veulent se lancer.
- La principale contribution du CEO consiste à placer le sujet au cœur de la stratégie de l’entreprise et de fixer des objectifs clairs (y compris des objectifs intermédiaires et des objectifs pour les fournisseurs). Sur ce point, le conseil d’administration devrait également donner une impulsion plus forte ; actuellement les signaux les plus forts viennent en effet des investisseurs.
- Par conséquent, la stratégie doit être établie par exemple en fonction de la taxonomie de l’UE, ce qui conduit parfois à une restructuration profonde de l’entreprise (par exemple, une société d’ingénierie qui abandonne l’ingénierie du charbon). Cela vaut la peine d’engager cette transformation en temps voulu.
- Ce qui semble essentiel, c’est de suivre la trajectoire allant vers zéro net. On ne doit pas être découragé par la complexité et les questions de détail. Ceux qui commencent sans tarder auront en effet suffisamment de temps pour la transformation et feront en fin de compte partie des gagnants.